Ghadir Ismail
Évènement

Un congrès international autour du féminisme, du droit et de la citoyenneté

Les 11 et 12 juillet, le centre Panthéon a accueilli plus d’une centaine de participantes internationales dans le cadre du congrès « Féminisme, droit et citoyenneté » organisé par Alexandrine Guyard-Nedelec, maîtresse de conférences en civilisation britannique au sein de l’Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne (ISJPS) et Rosemary Auchmuty, professeure de droit à l’université de Reading (Royaume-Uni).

Ce rendez-vous très attendu des participantes s’est ouvert lors de la première séance plénière en présence de Lady Hale, ancienne présidente de la Cour suprême du Royaume-Uni. Droits reproductifs, violence, culture et identité ou encore politiques pénales : plusieurs ateliers ont rythmé ces des journées d’échanges. Retour sur l’évènement avec Alexandrine Guyard-Nedelec.

Comment avez-vous organisé ce colloque ?

Alexandrine Guyard-Nedelec : Ce colloque“Féminisme droit et citoyenneté” est le fruit d’une réflexion née lors d’un précédent congrès de sociologie du droit, “Law and Citizenship Beyond The States”, organisé par le Research Committee on the Sociology of Law à Lisbonne, en 2018. Rosemary Auchmuty et moi-même, qui sommes membres du RCSL, y avions participé et avions fait le constat que la thématique de la citoyenneté était particulièrement féconde pour analyser un certain nombre de questions liées au féminisme et aux droits des femmes. Notre colloque aurait dû se tenir en juin 2020 mais la pandémie de Covid-19 en a décidé autrement… Malgré les incertitudes et les difficultés liées à cette crise sanitaire, la majorité des intervenant·es a maintenu sa participation, ce qui a fait de l’événement une belle rencontre internationale, riche tant sur le plan scientifique que sur le plan humain : 24 pays étaient représentés !

Quelles sont les grandes thématiques qui ont été traitées, pourquoi ce choix, et comment les intervenants ont-ils été choisis ?

Alexandrine Guyard-Nedelec : L’appel à communications avait identifié des thématiques (non exclusives) en lien avec le sujet du colloque : activisme féministe, démocratie et montée des populismes, droits des femmes, droits reproductifs et justice reproductive, égalité femmes-hommes, genre et sexualité, intersectionnalité. Les propositions de communications que nous avons reçues puis sélectionnées se sont inscrites dans ces thématiques et les ont complétées, ce qui nous a permis d’organiser des ateliers parallèles offrant une réelle cohérence scientifique. Je crois qu’il est important pour l’université de se saisir de questions très saillantes dans l’actualité, telles que les féminicides, #MeToo et la présomption d’innocence, ou encore le droit à l’avortement, et c’est ce que nous avons aussi fait pendant ces deux jours, pour les analyser de façon académique et non journalistique.

Comment le droit et le féminisme cohabitent-ils ? 

Alexandrine Guyard-Nedelec : Comme le rappelait Diane Roman dans le dossier du troisième numéro de la revue #1257 consacré aux études sur le genre, droit et féminisme entretiennent des relations ambivalentes. J’ajouterais que c’est particulièrement le cas en France. En effet, si le féminisme inscrit son action dans le champ du droit, puisqu’il s’agit d’un mouvement politique et social visant l’égalité des droits et l’émancipation des femmes, la construction disciplinaire du droit en France n’a pas encore permis de faire la part belle aux études critiques du droit et continue de regarder avec méfiance les apports de la théorie féministe. En revanche, c’est beaucoup moins vrai dans d’autres pays, notamment les pays anglo-saxons, où peut exister un véritable dialogue entre droit et féminisme. Lady Hale, qui nous a accordé un grand entretien pour la conférence d’ouverture du colloque, en est sans doute le meilleur exemple : juriste hors-pair, ancienne vice-présidente puis présidente de la Cour suprême du Royaume-Uni, elle a toujours revendiqué son positionnement féministe et pris la parole haut et fort pour défendre la cause des femmes.

Pouvez-vous nous en dire plus sur l'axe genre de l’Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne ?

Alexandrine Guyard-Nedelec : Le colloque est entré en résonance avec nombre des thématiques qui sont au cœur des activités de l’axe genre de l’ISJPS, notamment avec celles de notre séminaire d’actualité éditoriale, qui rencontre un succès croissant. En 2021-22, nous avons reçu Manon Garcia, pour échanger sur le consentement sexuel, Alexandra Korsakoff sur l’imbrication du genre et du statut de réfugié·e, Emmanuel Beaubatie sur la notion de transfuge de sexe, Natacha Chetcuti-Osorowitz sur les femmes incarcérées, Sybille Gollac et Céline Bessière sur le genre du capital, Héléna Hirata sur le care, et enfin Mariette Sineau et Armelle Le Bras Chopard sur les femmes et la république. Le programme 2022-23 s’annonce tout aussi passionnant !

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